LE TEMPS DE LA MUE

Patrick-Joël Tatcheda Yonkeu
20 FÉVRIER - 15 MAI 2021

EXPOSITIONS

présentation

Patrick-Joël à propos de l’exposition :

« Le temps de la mue » est aussi le temps des méditations sur les mutations à venir, le temps de penser et repenser notre façon d'être au monde et la société par rapport au temps qui s'écoule. C'est le temps du grand saut quantique à l'aube du nouveau monde qui est déjà à nos portes. »

Il s'agit de la première exposition monographique de Patrick-Joël Tacheda Yonkeu, qui présente des œuvres réalisées au cours des dix dernières années.

L'exposition vise à présenter de manière exhaustive l'évolution artistique de l’artiste. Mais elle incarne aussi la fin d'un chapitre. Elle est l'expression d’un récit qui se termine - avec toutes ses complexités et tous ses enseignements - pour laisser place à quelque chose de nouveau, à une œuvre qui se transforme, qui se mue.

Ascèse (en anglais Ascent) est un témoin de cette réformation corporelle. Les imperfections de sa texture et sa surface ondulante (rappelant la série présentée en sélection officielle à Dak'Art en 2018) témoignent de la mue de l'œuvre, comme si l'œuvre refusait presque de se coucher sur la toile en s'arrachant la peau. Des tâches diluées et multiformes d'un bleu primordial, rappelant des expressions primitives capturées dans une danse ancienne, apparaissent en grande harmonie. Ces formes apparaissent tantôt comme des détails organiques de laboratoire, et tantôt telles des images de la terre, vue d’en haut, de l’espace ; des expériences artistiques qui sont donc à la fois des micros et des macros perspectives.

L'œuvre de Patrick-Joël est fortement marquée par son intérêt pour l'Histoire ancienne et la Mythologie en tant que temporalité où étudier et comprendre les origines des civilisations et les archétypes de nos modes de vie contemporains ou, comme il le dit, "les connaissances essentielles qui imprègnent encore le monde aujourd'hui". L'artiste aborde l'histoire de l'Humanité pour mettre en lumière la relation des hommes les uns avec les autres, donnant lieu à des conflits et à des batailles de pouvoir.

Autre interaction fondamentale qui intéresse l’artiste : "l'Homme face à la Nature" et ses différentes manifestations dans la culture et la religion. L’Animisme comme le Bouddhisme place l'homme dans une relation harmonieuse avec son environnement en considérant toute chose vivante, alors que la civilisation occidentale place l'homme au centre de l'univers.

Pour Patrick-Joël, l'homme n'est donc pas différent d'une plante, il a la même valeur qu'un rocher, que le vent, que l'air, le soleil ou le feu. Son utilisation d’un support éphémère comme le papier, tout comme le temps de séchage relativement long des pigments naturels et de l'huile révèlent donc ce type d’interactions. Une technique qui impose la patience et contraint l’artiste à respecter le cycle de la nature. Plus encore, son procédé raconte un rituel. Un rituel qui tient compte des traditions et qui est lié au culte des ancêtres. Durant la création, Patrick-Joël accomplit une véritable performance dont l'œuvre en est une empreinte spatio-temporelle.

Pour réaliser ces œuvres - des plus petites aux plus grandes - Patrick-Joël lâche prise, se perdant presque dans sa gestuelle. Au contact des œuvres, notre regard se heurte à une explosion de couleurs ancestrales qui se fond ou se disperse dans une perpétuelle mouvance. On devine les gestes de l’artiste et pourtant nous avons conscience de la nécessité d’un temps de repos des travaux pour devenir les œuvres qu’elles sont. D’où leur aspect explosif et contemplatif.

De manière générale, le discours de l'artiste porte sur la notion de collectivité. Il considère qu’être humain aujourd'hui, c’est interagir les uns avec les autres d'une manière saine. La raison qui pousse Patrick-Joël à aller au-delà d’une simple création artistique est de redécouvrir une conscience morale collective qui soit juste, équitable et mieux adaptée à notre époque.

Il invite le spectateur à remonter aux origines de la civilisation humaine et à repenser équitablement l'histoire et le développement afin d'éviter une répétition perpétuelle nos erreurs. Ce n'est qu'avec une vision multilatérale du monde, par opposition à une vision monocentrique, que nous pourrons embrasser une relecture juste de notre passé, évitant ainsi une amnésie collective sur nos maux. Toutefois, dans cette exposition, Patrick Joël invite également le spectateur à parcourir le cheminement qui a conduit à la mue comme un temps de renaissance et de redécouverte artistique.

Selon les propres termes de Patrick-Joël :

"Peut-être n'est-ce qu'une question de rythme, de rythme de la terre, de transmutation, ou de transcendance du "je" pour embrasser un "nous" dans son essence".